De Panama a la Jamaïque… contre les préjugés!
Il faut savoir que dans le milieu de la plaisance, la Jamaïque a
très mauvaise presse au niveau de la sécurité. Chaque personne
rencontrée nous cite les nombreux crimes qui y sont commis…. De
plus la majorité nous dit « Cette navigation est impossible a cause
des vents et des courants contraires…. la seule route possible
est de passer par la Colombie…. par Curaçao…. changez de
destination… a votre place j’attendrai… » Et bien NON! Nous
avons appris que l’avis bienveillant des uns et des autres, basé sur
des « on dit » n’est pas une source fiable de conseils et donc de
décisions!
Nous avons étudié de nombreux récits de voyage en
Jamaïque – en particulier ceux de Frank Virgintino – ainsi que les
conseils de Lonely Planet et avons appris que la grande majorité des
crimes sont commis à Kingston, en rapport avec la drogue ou autre
activité illégale… et que les risques sont minimum si on ne traine
pas dans les mauvais quartiers et restons a l’écart des trafics de
drogue. Par contre ces récits ne semblent pas avoir de
qualificatifs assez forts pour décrire l’accueil sympathique des
Jamaïquains!
Nous étudions également la météo depuis plus de quinze jours et à partir de demain le vent devrait s’orienter un peu au sud-est en mollissant…. puis se renforcer pour une nuit ou deux avant de se calmer. Les vagues prévues sont de trois mètres en moyenne… on aurait préféré moins pour notre confort, mais cela ne présente pas de dangers et c’est gérable…. c’est juste que nous allons nous faire secouer!!! Si nous ne partons pas demain nous risquons de ne pas avoir de conditions aussi favorables pour plusieurs semaines….
Vendredi 3 Février – Nous devons faire notre sortie du Panama. Dès 9h00 nous sommes à terre sur l’ile de Provenir – qui est en fait juste assez grande pour une piste d’atterrissage et les quelques baraques des services des frontières. En préparant nos papiers nous nous rendons compte que notre Zarpe (permis de navigation) n’était valide que 24 heures après notre entrée au Panama six semaines plus tôt (lire le blog sur notre entrée a Puerto Obaldia)…. Nous ne sommes donc pas en règle depuis plus de six semaines et c’est un peu inquiets que nous nous dirigeons vers les bâtiments de l’immigration, des douanes et des affaires maritimes…
Un indien Kuna, agent de l’immigration, nous reçoit très cordialement. Il faut savoir que les indiens Kuna ne se considèrent pas tout a fait Panaméens…. Il nous annonce que l’officier Panaméen des douanes et des affaires maritimes n’est pas présent aujourd’hui pour nous donner un Zarpe de sortie du Panama – c’est avec lui que nous aurions eu des problèmes et surement une forte amende!!!!… En voyant notre inquiétude il nous rassure rapidement car il a l’autorité pour écrire une lettre de sortie qui fera office de Zarpe…. Il inspecte nos documents…. nous sommes tendus avec un « sourire » un peu crispe… puis…. il sort un ordinateur, une imprimante et une boite de tampons. Ouf! il n’a pas vu (ou a ignoré?) que notre Zarpe n’était valide que 24 heures. Quinze minutes plus tard nous retournons sur Hibiscus avec tous nos documents en règle! Nous sommes prêts à partir demain pour la traversée vers la Jamaïque.
Nous passons le reste de la journée à quelques milles de là, sur Chichime Cays – un beau mouillage entouré de quelques îlots et bien abrité.
Samedi 4 au Mardi 7 Février – Apres un coup de fil a Damien pour lui souhaiter un joyeux anniversaire, nous levons l’ancre a 8h00… direction La Jamaïque… un peu plus de 550 milles ou 4 jours de mer. Nous serrons le vent d’assez près pour gagner le plus possible vers l’Est… car nous espérons aller a Kingston – la capitale – qui se trouve presque à l’extrémité Est de l’ile.
Trois jours sur un plancher incliné a 35 degrés, qui se cabre a chaque passage de vagues et retombe dans le creux avant la suivante….. certaines vagues déferlent contre la coque et ce sont des centaines de litres d’eau qui retombent dans le cockpit…. tout est trempé, salé…. impossible de faire quoi que ce soit… aller aux toilettes est une expédition – une aventure … nous devons manger rapidement nos soupes aux nouilles chinoises avant qu’elles ne giclent hors du bol… pas une partie de plaisir!!! Mais Hibiscus se comporte a merveille et le pilote automatique fait son travail sans broncher. Nous nous sentons en sécurité!… quoique!!!! pas toujours…commentaire Nathalie
Nous réglons constamment les voiles pour s’adapter aux changements tant en direction qu’en force du vent. Nous prenons un bulletin météo chaque jour afin d’anticiper une éventuelle perturbation…. Au fil du temps nous nous rendons compte que le courant nous déporte fortement vers l’Ouest et que nous ne pourrons pas aller a Kingston… qu’a cela ne tienne, nous irons sur la côte ouest de la Jamaïque… mais le vent vire de plus en plus vers le nord et nous allons rater la Jamaïque!!! Un coup d’œil sur la carte et on se dit que nous atterrirons peut-être aux Iles Caïmans qui se trouvent un peu plus au nord-ouest…. pas de problème nous y investirons quelques dollars… il faut faire avec ce que la nature nous donne!
Mercredi 8 Février – Dans la nuit du 7 au 8 Février le vent tombe complètement – comme prévu dans les bulletins météo!! Nous sommes a 40 milles au sud ouest de la Jamaïque et de grands hauts fonds (Pedro bank) nous protègent de la houle. En peu de temps la mer devient complètement plate. Nous mettons le moteur en marche… cap vers la Jamaïque. Au lever du jour nous apercevons la terre. La cote est franche et nous longeons celle-ci d’assez près…. jusqu’à ce que nous tombions dans un champs de filets et de casiers… alors, après un peu de slalom, nous nous écartons un peu plus de la cote. Huit heures plus tard nous entrons dans la baie de Montego.
Nous mettons l’ancre entre le Yacht Club et le quai où est amarré un paquebot de plus de 10 étages (4000 passagers), c’est énorme, une montagne a moins de 50 mètres derrière nous.
A la nuit tombante un grand catamaran de promenade s’amarre a une bouée devant nous – l’arrière de son flotteur n’est qu’a 2 mètres de notre étrave. Le skipper nous fait signe que nous sommes bien ou nous sommes…. Deux heures plus tard trois autres catamarans viennent s’amarrer a des bouées tout autour de nous… nous sortons les pare-battages… Hibiscus vient se coller contre l’un d’eux, puis se rapproche d’un autre… nous ne pourrons pas dormir!!! alors pour assurer le coup nous nous attachons a l’un d’eux avec de bonnes protections pour ne pas rayer leur peinture brillante… et nous allons dormir. Demain nous trouverons un meilleur endroit pour mettre l’ancre!
Jeudi 9 au Vendredi 10 Février – Excellent accueil au Yacht Club qui se charge d’appeler les diverses autorités afin de faire notre entrée en Jamaïque (douanes, immigration et sanitaire). Nous profitons du confort du Yacht Club, de sa terrasse ombragée entre la piscine et le ponton, de son restaurant… et surtout de ses douches!
Un taxi nous emmène très – trop – rapidement dans le centre de Montego Bay. Il y a du monde partout, sur la route, sur les trottoirs… et c’est a coups de klaxon que notre chauffeur fonce en zigzaguant entre les obstacles.
Le paquebot de croisière est reparti dans la nuit et nous sommes pratiquement les seuls touristes en ville… et plutôt reconnaissables! C’est en fait une ville qui vit au rythme de l’arrivée des paquebots de croisière, et voila que ce système destiné a servir plus de 4000 touristes se réveille et se concentre sur nous! Alors nous sommes assaillis de toutes parts pour nous servir de guide ou nous entrainer dans chacune des dizaines de baraques qui vendent toutes les mêmes souvenirs.
Nous flânons et discutons longuement avec quelques vieilles dames qui souhaitent nous vendre des souvenirs – notre manque d’intérêt ne les freine pas et elles ne manquent pas d’imagination pour nous faire avancer d’un pas vers le fond de la baraque et nous questionner sur notre vie, notre famille, notre voyage…. rien ne les arrête… elles nous prennent par la main, nous embrassent, éclatent de rire avec nous…. et tout cela dans la bonne humeur et sans pression directe! Nous ne sommes pas intéressés… elles n’insistent pas et attirent notre attention vers autre chose. Notre phrase magique pour se dégager est « little more time » et même si on n’achète rien elles continuent en nous disant que comme cela nous saurons ou venir quand nous serons prêts a acheter… puis elles nous embrassent et nous souhaitent bon voyage.
Commentaire Nathalie…en effet nous n avons rien acheté mais a vrai dire Philippe semblait très attire par la mode « Rasta »!!!!
Nous commençons a nous sentir mal à l’aise de dire « non » gentiment et avec le sourire a tous ces visages et ces mains qui nous appellent avec l’espoir d’une vente. Alors nous retournons rapidement au Yacht Club et décidons de lever l’ancre le lendemain. Nous rencontrons un couple d’Anglais qui nous indiquent une baie plus a l’est… voila notre prochaine étape: Discovery Bay.
Nous devrons voyager de nuit et au moteur car les vents dominants d’Est sont assez forts dans la journée et se calment la nuit. Notre départ est prévu pour 3h00 du matin…